Page:Souvestre - Un philosophe sous les toits, 1854.djvu/91

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En quittant la manufacture, les deux sœurs, qui se sont emparées de moi avec la liberté des bons cœurs, m’invitent à partager la collation qu’elles ont apportée. Je m’excuse d’abord ; mais leur insistance a tant de bonhomie que je crains de les affliger, et je cède avec quelque embarras.

Il faut seulement chercher un lieu favorable. Je leur fais gravir le coteau, et nous trouvons une pelouse émaillée de marguerites qu’ombragent deux noyers.

Madeleine ne se possède point de joie. Toute sa vie elle a rêvé un dîner sur l’herbe ! En aidant sa sœur à retirer du panier les provisions, elle me raconte toutes les parties de campagnes projetées et remises. Françoise, au contraire, a été élevée à Montmorency ; avant de rester orpheline, elle est plusieurs fois retournée chez sa nourrice. Ce qui a, pour sa sœur, l’attrait de la nouveauté, a pour elle le charme du souvenir. Elle raconte les vendanges auxquelles ses parents l’ont conduite ; les promenades sur l’âne de la mère Luret, qu’on ne pouvait faire aller à droite qu’en le poussant à gauche ; la