Page:Souza - Où nous en sommes, 1906.djvu/26

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« Il serait puéril de nier qu’un esprit nouveau, depuis quelques années, anime notre poésie. Et M. Gustave Kahn aura beau échafauder d’ingénieux arguments pour prouver que le Symbolisme continue son évolution et que nous vivons sur son épanouissement, rien n’ira contre ce fait que le Symbolisme est bien mort et pompeusement enterré… Il est mort en tant que symbolisme et surtout que vers-librisme ; il est mort en tant qu’expression surannée d’états d’âmes rares généralement motivés par de curieuses maladies dont les moindres sont la jobardise et l’obsession des typographies mystérieuses et des métaphores incohérentes ; il est mort en tant que recherche vaine de rythmes extraordinaires, de musiques infiniment subtiles, de vocabulaires étranges et abscons ; il est mort en tant que poésie éperdument égotiste, en tant qu’individualisme excessif et rétif à toute discipline ; il est mort enfin en tant qu’inintelligible et illusoire beauté. Quelques obstinés s’évertueront sans doute encore à clamer du plus profond de ses ténèbres. Ils sont semblables au trompette de la légende allemande qui, mort, sonnait encore la charge pour entraîner des soldats-fantômes. »

Et M. Léon Vannoz (Revue bleue, 23 mai), pour opposer Deux Poétiques, d’affirmer :

« Le symbolisme, ou du moins l’école littéraire qui a vécu sous ce nom, achève de mourir. Les écrivains les plus notoires qui se recommandaient d’elle, ou bien n’écrivent presque plus, ou bien se sont tournés du côté de l’action politique, ou bien ont fait de riches mariages : quelques-uns sont même en passe d’arriver à l’Académie. Comme le dirait Henriklbsen, ils sont déjà à moitié morts ; en tout cas, leur école n’a plus de raison d’être, et depuis quelque temps déjà, elle n’existe plus. »

Mais il faut s’arrêter un peu plus longtemps sur :