Page:Souza - Où nous en sommes, 1906.djvu/79

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qu’on leur impose. La poésie lyrique francaise ne suivit donc pas le développement naturel de ses origines, tel que l’alliance du vers rythmique latin et des rythmes de nos danses populaires l’avait préparé. En réalité, elle subit les martellements et les rivets métriques de la langue d’oc. Nos défenseurs de la vieille prosodie soutiennent avec de simples pédantismes de grammairiens les empiétements d’une versification étrangère !…

M. André Beaunier n’eut donc pas tort de nouer étroitement au véritable vers libre le symbolisme. C’était reconnaître une double tradition : —au pointde vue poétique, dans son sentiment de tout ce qui fut du lyrisme véritable ; — au point de vue technique, dans sa recherche de nos rythmes naturels sous la raideur des faux mètres renaissants. Puis un art n’existe point sans une forme qui le porte, une forme réelle, vivante, qui ne soit pas un compromis. Cette forme progresse. « On ne peut considérer l’évolution du vers libre comme terminée, dit justement Gustave Kahn, mais seulement comme à ses débuts. » Les incertitudes de beaucoup et leur amour des compromis, qui ne permettent pas de profiter de toutes les ressources de la langue, prouvent en effet que, sur ce point spécial de la technique, il n’y eut pas plus de trois ou quatre symbolistes entièrement conscients. Et à part deux d’entre eux, ceux-là connurent Terreur de compter sur d’autres pour dégager de leurs œuvres les lois fondamentales, dédaignant toute action critique rigoureusement déduite pour quelques énonciations trop sommaires, quelques revendications inutiles ou quelques allusions élégantes et insuffisantes. On sait comment ils furent récompensés de leur discrétion.

Quoi qu’il en soit, un des grands honneurs des symbolistes