Page:Spencer - La Science sociale.djvu/10

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
LA SCIENCE SOCIALE

CHAPITRE PREMIER

NÉCESSITÉ DE LA SCIENCE SOCIALE

Au cabaret du village, l’ouvrier qui pérore en fumant sa pipe, décide quelles mesures le Parlement devrait prendre pour arrêter la propagation d’une épizootie. À la ferme, le maître discourt sur la peste bovine tout en arrosant un marché ; il frappe la table du poing et jure qu’on lui a donné une indemnité moitié trop faible pour les bestiaux qu’on lui a fait abattre pendant l’épidémie. Ce ne sont point là des opinions hésitantes. Pour tout ce qui touche à l’agriculture, les opinions sont restées à l’état de dogmes comme au temps de l’agitation contre la loi sur les grains ; on entendait alors répéter dans tous les cercles ruraux que la nation était ruinée si l’on permettait à l’étranger, qui ne paie que peu d’impôts, de faire concurrence sur nos marchés à l’Anglais, qui en est surchargé : proposition tenue pour si évidentes en soi, qu’on ne pouvait la rejeter sans passer pour un sot ou un fripon.

Aujourd’hui comme alors, on entend constamment, parmi d’autres classes de la société, émettre des opinions tout aussi tranchantes et tout aussi peu justifiées. Des hommes que l’on appelle éclairés, défendent encore les dépenses