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Page:Spenlé - Novalis.djvu/459

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LES PROBLÈMES

et le personnage plus ou moins fictif, dont la physionomie se dessine dans l’œuvre littéraire.

Déjà M. Dilthey a eu le sentiment de la complexité du problème psychologique. Il y a, selon lui, chez Novalis à la fois un aspect pathologique et un aspect sain. Des dispositions maladives et destructives luttaient sans cesse chez lui avec des activités positives et saines. « C’était en vérité une nature, sinon franchement pathologique, du moins toute subjective. Certaines émotions persistantes l’ont entièrement absorbé, jusqu’à failli disparaître à ses yeux l’ensemble des réalités qui constituent le monde » (Preussische Jahrbücher, op. cit. p. 605). Particulièrement saisissant apparaît le conflit entre ces deux natures dans le Journal du poète : « Ce Journal, mieux que toutes les légendes, nous montre quelles puissances il y a en nous qui nous poussent à nous détacher du monde et même de la vie, — et quelles autres puissances réagissent sans cesse contre les premières. Qui peut dire comment se serait terminé le conflit, s’il s’était déroulé dans la cellule silencieuse d’un monastère ! » (op. cit. p. 607). Ainsi M. Dilthey croit à l’absolue sincérité de cette crise. Novalis en est-il sorti vainqueur ? A-t-il définitivement triomphé, au moins intellectuellement et moralement, de ces puissances destructrices ? L’auteur ne le croit pas. Il compare à cet égard la crise racontée dans le Journal du poète à la conversion de St Augustin. « La destinée individuelle ne fut pas pour Novalis, comme pour les natures vraiment supérieures et intellectuelles, un simple aiguillon qui stimula en lui une conception plus compréhensive de l’univers. Il est resté complètement emprisonné dans sa destinée. Elle a imprégné toute sa pensée, elle a déterminé le contenu de sa vie religieuse. Il ne s’en est libéré dans la suite que partiellement » (op. cit. p. 605).

Ce sont les deux mêmes aspects contraires, — l’aspect sain et l’aspect morbide — qui se retrouvent dans l’étude de M. Haym, sans que cet auteur ait réussi à les concilier ou tout au moins à interpréter cette dualité. Il commence par nous