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DE DIEU

célestes composent une harmonie. Tout cela montre assez que chacun juge des choses selon la disposition de son cerveau ou plutôt leur a laissé se substituer les manières d’être de son imagination. Il n’y a donc pas à s’étonner (pour le noter en passant) que tant de controverses se soient, comme nous le voyons, élevées entre les hommes et que le Scepticisme en soit enfin provenu. Si, en effet, les corps humains conviennent en beaucoup de points, ils diffèrent en un très grand nombre et, par suite, ce qui paraît bon à l’un, semble mauvais à l’autre ; l’un juge ordonné ce que l’autre trouve confus ; ce qui est au gré de l’un, est à l’autre désagréable, et ainsi du reste. Je n’y insisterai pas, et parce que ce n’est pas le moment de traiter avec développement de ces choses, et parce que tout le monde en a assez fait l’expérience. Tout le monde répète : Autant de têtes, autant d’avis ; chacun abonde dans son sens ; il n’y a pas moins de différence entre les cerveaux qu’entre les palais. Et tous ces dictons montrent assez que les hommes jugent des choses selon la disposition de leur cerveau et les imaginent plutôt qu’ils ne les connaissent. S’ils les avaient clairement connues, elles