On est un peu choqué d’abord de voir que les amis de Spinoza songèrent à vendre ces manuscris, que même des pourparlers furent engagés avec Leibniz à cet effet[1] ; pour ne pas juger ce projet de vente avec une sévérité imméritée, il faut observer[2] que plusieurs copies avaient été prises de ces manuscrits, en particulier de l’Éthique ; la cession de l’original n’eût donc pas empêché la publication, elle eût même pu la faciliter, car Spinoza était mort dans une extrême pauvreté, ses héritiers naturels avaient renoncé à sa succession, et l’on avait craint un moment que la vente du peu d’objets laissés, par lui ne suffit pas à payer son inhumation ; l’argent produit par la vente des manuscrits eût probablement servi à faire les frais de l’impression des Œuvres posthumes ; enfin, il était permis de croire que Leibniz, plus capable que personne de juger de l’importance des papiers laissés par Spinoza, les eût précieusement conservés et finalement laissés à quelque bibliothèque où la postérité les eût retrouvés.
Quoi qu’il en soit, on ne donna point suite au projet de vente, et, grâce à un généreux anonyme d’Amsterdam qui procura l’argent nécessaire, la publication des Œuvres posthumes[3] eut lieu dès le mois de novembre 1677. Presque en même temps parut une traduction hollan-
- ↑ Schuller, qui était en correspondance avec Leibniz, servit d’intermédiaire. — Voir Stein, op. cit., p. 286 ; — Freudenlhal, Die Lebensgeschichte Spinoza’s, p. 302.
- ↑ Voir les remarques judicieuses faites à ce sujet par Freudenthal, Spinoza sein Leben und seine Lehre (p. 307).
- ↑ Pour le contenu de cette édition, voir vol. 1, p. 207, note 1. J’ai eu l’occasion de dire ailleurs que la préface est de Jarig Jelles, en collaboration peut-être avec Louis Meyer.