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ÉTHIQUE

lui Paul ; il semble suivre de là d’abord que ces deux hommes se portent dommage l’un à l’autre parce qu’ils aiment le même objet et conséquemment s’accordent en nature ; et, si cela est vrai, les Propositions 30 et 31 seraient donc fausses. Si cependant nous voulons peser l’argument dans une balance juste, nous verrons que tout cela s’accorde entièrement. Ces deux hommes ne sont pas sujets de peine l’un pour l’autre en tant qu’ils s’accordent en nature, c’est-à-dire aiment tous deux le même objet, mais en tant qu’ils diffèrent l’un de l’autre. En tant en effet que tous deux aiment le même objet, l’amour de l’un et de l’autre est par là alimenté (Prop. 31, p. III), c’est-à-dire (Déf. 6 des Aff.) que la Joie de l’un et de l’autre est par là alimentée. Il s’en faut donc de beaucoup qu’ils soient sujets de peine l’un pour l’autre en tant qu’ils aiment le même objet et s’accordent en nature. Ce qui les rend sujets de peine l’un pour l’autre, ce n’est aucune autre cause, comme je l’ai dit, que la différence de nature supposée entre eux. Nous supposons en effet que Pierre a l’idée d’une chose aimée, actuellement possédée par lui, et Paul, au contraire, celle d’une chose aimée actuellement