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Page:Spinoza - Éthique, trad. Appuhn, 1913.djvu/535

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DE LA SERVITUDE DE L’HOMME

autres moins de cas qu’il n’est juste, et à cet égard on définira l’Orgueil comme étant la Joie née de l’opinion fausse par laquelle un homme se croit supérieur aux autres. Et la Mésestime de soi, contraire à cet Orgueil, se définira la Tristesse née de l’opinion fausse par laquelle un homme se croit inférieur aux autres. Cela posé, nous concevons facilement que l’orgueilleux est nécessairement envieux (Scolie de la Prop. 55, p. III), et qu’il a surtout en haine ceux qu’on loue le plus pour leurs vertus ; que sa Haine à leur égard n’est pas facilement vaincue par l’Amour ou le Bienfait (Scolie de la Prop. 41, p. III) ; et qu’il ne prend plaisir qu’à la présence de ceux qui lui montrent le plus de complaisance, et de sot le rendent insensé.

Bien que la Mésestime de soi soit contraire à l’Orgueil, celui qui se mésestime est cependant très proche de l’orgueilleux. Puisque, en effet, sa Tristesse vient de ce qu’il juge de son impuissance par la puissance ou vertu des autres, cette Tristesse sera allégée, c’est-à-dire il sera joyeux, si son imagination s’occupe à considérer les vices des autres, d’où ce proverbe : c’est une