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DE LA SERVITUDE DE L’HOMME

Ce qu’il faut observer sur la Honte ressort facilement de ce que nous avons dit sur la Miséricorde et le Repentir. J’ajoute seulement que, comme la Commisération, la Honte, qui n’est pas une vertu, est bonne cependant en tant qu’elle dénote dans l’homme rougissant de honte un désir de vivre honnêtement ; de même la douleur, qu’on dit bonne en tant qu’elle montre que la partie blessée n’est pas encore pourrie. Bien qu’il soit triste donc, en réalité, l’homme qui a honte de ce qu’il a fait, est cependant plus parfait que l’impudent qui n’a aucun désir de vivre honnêtement.

Telles sont les observations que j’avais résolu de faire sur les affections de Joie et de Tristesse. Pour les Désirs, ils sont bons ou mauvais, suivant qu’ils naissent d’affections bonnes ou mauvaises. Mais tous, en tant qu’ils naissent en nous d’affections qui sont des passions, sont aveugles (comme il ressort aisément de ce qui a été dit dans le Scolie de la Prop. 44), et ne seraient d’aucun usage si les hommes pouvaient être facilement amenés à vivre suivant le seul commandement de la Raison, comme je vais le montrer brièvement.