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AGAR

Agar, à part.

Quelque nourriture ! Hélas ! le pauvre enfant ne sait pas que notre provision est épuisée. Comment le lui dire ? et que faire, néanmoins, s’il ne peut plus marcher ?

Ismaël.

Ma mère, viens t’asseoir à côté de moi ; cela me rendra des forces. (Agar s’assied sur un rocher à côté de son enfant.) Dis-moi, ma mère, pourquoi avons-nous quitté la maison de mon père ? on y étoit si bien, l’air y étoit si frais sous les palmiers !

Agar.

Ismaël, ta mère n’étoit qu’une pauvre esclave que ton père Abraham avoit emmenée d’Égypte. Quand la superbe Sara, son épouse, obtint du ciel un fils, notre présence à tous les deux lui devint importune ; elle demanda notre exil, et ton père y a consenti.

Ismaël.

Quoi, mon père ! et savoit-il combien le désert est brûlant, comme on y est seul, comme on y souffre ?

Agar.

Il croyoit, mon enfant, que nous aurions la force de le traverser plus vite, car il est bon, Abraham : je ne murmure point contre lui ;