en me laissant la vie, il me fit jurer que pendant dix années je me cacherois à tous les regards.
Et c’est pour accomplir ce vœu que vous avez vécu dix ans dans le désert ?
Qu’y a-t-il de plus saint que la promesse ! elle soumet l’avenir au présent, et les désirs à la conscience. Sans mon enfant, je n’aurois pas demandé la vie : elle ne vaut pas, cette vie, les souffrances que l’on m’imposoit. Mais je pouvois conserver les jours de ma fille ; mon existence étoit son bien, étoit son droit, tant qu’elle pouvait lui servir. Une biche s’attacha constamment à nous et nous prodigua ses soins muets et fidèles ; tout dans notre solitude sembloit nous favoriser, et sans qu’aucun miracle s’accomplît pour nous, on eût dit que les événemens naturels se réunissoient et se succédoient pour nous protéger d’une façon toute merveilleuse. Ces dix années, qui devoient, par leur monotonie, ne laisser dans mon souvenir qu’une longue et pénible trace, sont remplies par une foule de pensées, de pressentimens, de prières, j’oserois dire d’inspirations saintes qui toutes ont élevé jusque vers