L’un de vos amis vous a mandé qu’il m’avait trouvé changé, et vous en êtes inquiet ; je vous en prie, rassurez-vous : je souffre, mais il n’y a point de danger pour ma vie ; j’ai assez souvent la fièvre le soir, ce sont les peines de mon âme qui me la donnent. Depuis quelque temps, je crains sans cesse que madame d’Albémar ne s’éloigne de moi ; le trouble qu’elle me cause excite dans mon sang une agitation continuelle ; mais ce n’est pas, soyez-en sûr, la maladie qui me tuera. Ne venez point me voir, vous ne pourriez rien sur moi ; jamais on n’a ressenti ce que j’éprouve ! Je sortirai de cet état, il faut qu’il finisse à quelque prix que ce puisse être, il le faut. Attendez mon sort ; je ne veux pas que votre vie paisible s’approche de la mienne ; une influence fatale tomberait sur vous.
Madame d’Ervins m’écrit encore ce matin qu’elle désire vivement que vous soyez témoin de la cérémonie de ce soir : venez me chercher à quatre heures pour me conduire à son couvent ; elle le veut, nous ne pouvons le lui refuser.
Si vous l’exigez, j’irai ; mais essayez de m’en dispenser, j’ai peur des émotions ; vous ne savez pas dans la disposition actuelle de mon âme, combien elles me font mal ! Je serai chez vous à quatre heures ; mais, s’il est possible, écrivez à madame d’Ervins que vous irez seule.
Si je ne suis pas encore tout à fait indigne de vous, ma Louise, je ne sais à quel secours du ciel je le dois. Méritais-je ce se-