déjà avait réprimandé la foule, l’appela d’un signe, et vint nous retrouver avec lui.
Tout le camp était en rumeur. On ne pouvait plus s’y retourner, encore moins s’y entendre. Les pagazis se querellaient à propos des bagages, les soldats à propos des effets de leurs maîtres, et criaient qu’on allait renverser les tentes. J’étais au fond de la mienne, à écrire mon journal, sans m’inquiéter du tumulte qui se passait entre Vouagogo, Vouanyamouézi et Vouangouana.
Tout à coup il se fit un silence tellement profond que je sortis pour voir quelle en était la cause. Thani et le ministre venaient d’arriver. « À vos tembés, Vouagogo ! à vos tembés, cria celui-ci. Pourquoi troubler ces voyageurs ? Qu’avez-vous à faire avec eux ? À vos tembés, vous dis-je, à vos tembés ! Tout Mgogo qui sera, trouvé dans le camp sans avoir rien à vendre, ni bétail, ni farine, ni denrée quelconque, paiera au mtémi soit de l’étoffe, soit des vaches. »
Il prit un bâton et chassa la foule devant lui. Les Vouagogo étaient là par centaines ; chacun lui obéit comme un enfant ; et pendant les deux jours que nous restâmes dans cet endroit, pas un curieux ne vint nous déranger.
La question du tribut fut de même réglée en peu de mots, grâce au ministre, avec laquelle elle fut traitée. Cet homme, plein de raison, accepta tout d’abord les six dotis qui forment le tribut ordinaire ; il se contenta d’un seul doti d’étoffe de première classe, et parut joyeux des quatre mètres d’oulyah dont je lui fis présent.
Pour aller du Moukondokou à l’Ouyanzi trois routes s’offrent au voyageur. La veille du départ, les Arabes vinrent dans ma tente afin de discuter sur le chemin qu’il fallait prendre. Les Kirangozis et les vétérans de la caravane furent appelés au conseil. La première route que les guides nous proposèrent fut celle du midi, qui est la plus fréquentée ; mais elle passe par Kiouhyeb, dont le chef a une réputation détestable, et Hamed se récria :
« Le sultan est mauvais, dit-il ; on lui a vu demander jusqu’à vingt dotis par caravane ; la nôtre devrait lui en donner soixante. Ne pensons pas à cette route. D’ailleurs il nous faudrait faire une tirikéza, et nous ne serions à Kiouhyeh qu’après demain. »
La seconde route, celle du centre, nous faisait arriver le lendemain à Mouniéka ; le jour suivant il y aurait tirikéza pour atteindre le camp d’Ounyambogi. Là nous ne serions plus qu’à deux heures de Kiti, où l’on trouve en abondance de l’eau et des vivres. Mais ni les Arabes, ni les guides ne connaissaient le chemin ; le seul