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Page:Stanley - Comment j'ai retrouvé Livingstone, trad Loreau, 1884.djvu/369

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village, qui était un homme plein de sens, et de lui demander son opinion à l’égard du fait.

Ils se rendirent ensemble auprès du chef, qui, au dernier mot du rapport, déclara sans hésiter que l’Arabe était un menteur, et que son histoire n’avait pas le moindre fondement, attendu que si les Mazitous avaient paru dans le voisinage, il l’aurait su tout de suite.

Cela n’empêcha pas Mousa de s’écrier :

« Non, non, docteur, non, je n’irai pas plus loin ; je ne veux pas être tué par les Mazitous ; je veux revoir mon père, revoir ma mère et mon enfant, qui sont à Johanna ; je ne veux pas rencontrer ces bandits.

— Moi non plus, répondit le docteur, je ne veux pas être tué par les Mazitous ; mais ils ne sont pas à craindre. Cependant, puisqu’ils vous effrayent, je m’engage à marcher droit à l’ouest, jusqu’au moment où nous serons éloignés de leur parcours. »

Mousa ne fut pas satisfait de la réponse et continua à gémir.

« S’il y avait deux cents fusils avec nous, dit-il, j’irais bien ; mais nous sommes trop peu de monde ; ils nous attaqueront pendant la nuit, et nous tueront jusqu’au dernier. »

Livingstone répéta sa promesse d’aller droit au couchant et de s’éloigner des Mazitous.

Vint le jour du départ, on se mit en marche ; un instant après tous les Anjouhannais avaient pris la fuite[1].

En me parlant de cette affaire, le docteur me dit qu’il avait failli tuer Mousa, ainsi qu’un autre instigateur du complot. La tentation avait été vive ; mais il se réjouissait de n’avoir pas souillé ses mains du sang de ces misérables.

Un ou deux jours après leur fuite, un autre homme de la bande, appelé Siméon Price, vint trouver le docteur et lui exprima les mêmes craintes. Obligé désormais de réprimer toute tentative de désertion, le docteur lui imposa silence, et lui défendit sévèrement de parler des Mazitous[2].

S’il n’avait pas eu l’assistance des indigènes, Livingstone aurait désespéré de pouvoir continuer sa route.  « Heureusement, me

  1. Ce furent ces Anjouhannais, qui, revenus à Zanzibar, inventèrent la mort de Livingstone pour expliquer leur retour.(Note du traducteur.)
  2. Les Mazitous ou Mazités, habitent au nord et au nord-ouest du lac Nyassa. C’est une tribu guerrière, de la même race que les Landines, les Zoulous, les Matébélés. (Voir Livingstone, Explorations du Zambèse et de ses affluents, p. 354, 463, 466.)(Note du traducteur.)