Page:Stanley - Comment j'ai retrouvé Livingstone, version abrégée Belin de Launay, 1876.djvu/110

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malheur, dont les avertissements, les récits, les craintes m’obsédaient et démoralisaient mes gens. Il le fallait d’ailleurs : j’avais dit à Ben Nasib, un des cheiks de Couihara, que jamais un blanc ne manquait à sa parole ; et j’aurais été perdu de réputation si, pour cause de faiblesse, je n’étais pas parti comme je l’avais annoncé.

En conséquence, toute la caravane, drapeaux au vent, fut passée en revue devant la porte du tembé ; chacun près de son ballot, qui était posé contre le mur. Il y eut un feu roulant d’acclamations, de rires, de cris de joie, de fanfaronnades africaines. Les Arabes s’étaient rassemblés pour nous voir partir. Tous étaient là, là, excepté Ben Nasib. Le vieux cheik, se disant malade, s’était couché, et m’envoyait par son fils une dernière tartine philosophique, précieux trésor que me léguait le fils de Nasib, fils d’Ali, fils de Séif.

J’emmenais avec moi cinquante et un hommes et trois enfants.

La salve du départ fut tirée. Les guides élevèrent leurs drapeaux, et chaque porteur prit sa charge. Peu de temps après, au milieu des cris et des chants, la tête de la colonne avait tourné l’angle occidental du tembé, et suivait la route qui mène au pays de Gounda.

« Maintenant, Shaw, veuillez partir. Je vous attends, monsieur. Si vous ne pouvez marcher, montez à âne.

– Excusez-moi, monsieur Stanley ; mais j’ai peur de ne pas pouvoir vous suivre.

– Pourquoi ?

– Je ne sais pas ; mais je me sens très faible.