Page:Stanley - Comment j'ai retrouvé Livingstone, version abrégée Belin de Launay, 1876.djvu/117

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l’épais feuillage, aux lèvres ma courte écume de mer, je laissai courir mon esprit. Malgré la beauté de cette lueur grise dont le ciel était éclairé, malgré la sérénité de l’air qui nous enveloppait, il s’éloigna d’abord et me conduisit en Amérique près de ceux que j’aime. Puis, revenant à la réalité, il me ramena à ma tâche incomplète, à l’homme qui, pour moi, était un mythe ; à celui que je cherchais, qui peut-être était mort, peut-être bien loin, peut-être à coté de nous, dans cette même forêt, dont les arbres me dérobaient l’horizon ; tout près de moi et aussi caché à mes regards que s’il eût été dans son petit cottage d’Ulva. Qui pouvait le savoir ?

J’étais cependant heureux ; et, bien qu’ignorant ce qu’il m’importait le plus de connaître, je ressentais une certaine quiétude, une satisfaction indéfinissable.

Le lendemain, trois heures de marche sur la terre brûlante d’une plaine nous conduisirent aux champs de Magnéra. La porte du village fut gagnée ; mais on nous en interdit l’entrée : la guerre étant partout, les habitants n’admettaient dans leurs murs aucune bande étrangère. On nous envoya dans un khambi situé près d’un chapelet d’étangs dont l’eau était bonne ; mais l’enceinte du camp ne renfermait qu’une demi-douzaine de cases en ruine, très peu confortables pour des gens fatigués.

On refusait même de nous vendre du grain et le chef nous renvoya deux choukkas royales que je lui avait