Page:Stanley - Comment j'ai retrouvé Livingstone, version abrégée Belin de Launay, 1876.djvu/70

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aménagé les eaux, on habiterait cette région sans plus de danger que tout autre pays neuf. Je n’y ai pas vu, dans le jour, le thermomètre s’élever à plus de vingt neuf degrés centigrades et demi. La seule chose à redouter pour le colon serait la férocité des mouches que nous avons décrites, et qui rendraient difficile l’élevage du bétail, jusqu’au moment où l’on aurait défriché les jungles et une portion des forêts.

Pendant que je rêvais à ce projet, la pluie tombait incessamment.

L’endroit, que nous occupions, en deçà de l’Ougérengeri, était un foyer de pestilence, affreux à la vue, odieux à la mémoire. Les ordures accumulées par des générations de porteurs avaient réuni là des myriades d’êtres grouillants et rampants : fourmis noires, rouges et blanches, qui infestaient le sol ; vers et mille-pieds de toute couleur, qui grimpaient sur toutes les tiges, se traînaient sur toutes les herbes, guêpes à tête jaune, aussi venimeuses que le scorpion, et dont les nids pendaient à chaque broussaille ; énormes scarabées, de la taille d’une souris, qui faisaient et qui roulaient des boules de fumier ; vermine de toute grosseur, de toute nuance et de tout genre. Aucune collection d’entomologie, pour le nombre et pour la variété, ne peut rivaliser avec celle qu’offraient les parois de ma tente.

Le 23 avril, nous profitâmes d’une éclaircie pour franchir le bourbier qui nous séparait de la rivière.

Je me suis toujours trouvé plus à l’aise, plus léger de corps et d’esprit lorsque j’étais en marche que pendant ces interminables jours de halte, où, rongé d’impatience,