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cité des moyens mis à la disposition du duc de Raguse, pour réprimer le mouvement insurrectionnel. Ce défaut de clairvoyance pourra étonner ; il le devait, en partie, à certaines relations de société, dont la confiance dans la force du gouvernement de Charles X était entière, et aussi parce qu’il croyait que le peuple manquerait de résolution et de persévérance. « Les Français ont donné leur démission en 1814, » disait-il souvent.

Lorsque le doute ne lui fut plus permis sur les résultats de ce grand mouvement, il fit afficher[1] un petit placard revêtu de sa signature, avec la qualité d’ancien auditeur au conseil d’État, et portant en substance : que le trône devait être offert « à M. le duc d’Orléans, et après sa mort à son fils aîné, si la nation l’en jugeait digne. » Cet écrit fut bientôt oublié au milieu des publications de toutes sortes qui se produisirent alors.

Il en fut de même d’une lettre qu’il adressa, je ne sais plus à quel journal, pour émettre son opinion à l’égard des nouvelles armoiries que la France devait adopter. Cette lettre me semble assez curieuse pour mériter d’être reproduite. La voici, avec la signature pseudonyme qu’il lui avait donnée.

Paris, le 29 octobre 1830.
« Monsieur,

» Des hommes graves cherchent des armes, ou plutôt des armoiries pour la France. Toutes les bêtes sont prises. L’Espagne a le lion ; l’aigle rappelle des souvenirs dangereux ; le coq de nos basses-cours est bien commun, et ne pourra prêter aux métaphores de la diplomatie. À vrai dire, il faut qu’une telle chose soit antique. Or, comment bâtir une vieille maison ?

» Je propose pour armoiries à la France le chiffre 29. Cela est original, vrai ; et la grande journée du 29 juillet a déjà ce vernis d’héroïsme antique qui repousse la plaisanterie.

OLAGNIER
» De Voiron (Isère). »

N’ayant pris aucune part à la révolution, Beyle n’avait

  1. Le 1er août 1830.