Page:Stendhal - Chroniques italiennes, I, 1929, éd. Martineau.djvu/149

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hasard fatal qui, sur un champ de bataille, m’a placé vis-à-vis de Fabio. Il avait deux ans de plus que moi ; il était plus expert dans les armes, plus hardi de toutes façons, plus fort. Mille raisons fussent venues prouver à ma femme que ce n’était point moi qui avais cherché ce combat. Elle se fût rappelé que je n’avais jamais éprouvé le moindre sentiment de haine contre son frère, même lorsqu’il tira sur elle un coup d’arquebuse. Je me souviens qu’à notre premier rendez-vous, après mon retour de Rome, je lui disais : Que veux-tu ? l’honneur le voulait ; je ne puis blâmer un frère !

Rendu à l’espérance par sa dévotion à la Madone, Jules poussa son cheval, et en quelques heures arriva au cantonnement de sa compagnie. Il la trouva prenant les armes : on se portait sur la route de Naples à Rome par le mont Cassin. Le jeune capitaine changea de cheval, et marcha avec ses soldats. On ne se battit point ce jour-là. Jules ne demanda point pourquoi l’on avait marché, peu lui importait. Au moment où il se vit à la tête de ses soldats, une nouvelle vue de sa destinée lui apparut.

— Je suis tout simplement un sot, se dit-il, j’ai eu tort de quitter Castro ; Hélène est probablement moins coupable que ma colère ne se l’est figuré. Non, elle ne