Page:Stendhal - Chroniques italiennes, I, 1929, éd. Martineau.djvu/181

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sur la place, mais jamais cette quantité de coups de feu tirés dans le jardin, au centre des bâtiments et sous les fenêtres des religieuses. L’affaire avait bien duré une heure et demie, et, pendant ce temps, le désordre avait été à son comble dans l’intérieur du couvent. Si Jules Branciforte avait eu la moindre intelligence avec quelqu’une des religieuses ou des pensionnaires, il eût réussi : il suffisait qu’on lui ouvrît l’une des nombreuses portes qui donnent sur le jardin ; mais, transporté d’indignation et de colère contre ce qu’il appelait le parjure de la jeune Hélène, Jules voulait tout emporter de vive force. Il eût cru manquer à ce qu’il se devait, s’il eût confié son dessein à quelqu’un qui pût le redire à Hélène. Un seul mot, cependant, à la petite Marietta eût suffi pour le succès : elle eût ouvert l’une des portes donnant sur le jardin, et un seul homme paraissant dans les dortoirs du couvent, avec ce terrible accompagnement de coups d’arquebuse entendu au dehors, eût été obéi à la lettre. Au premier coup de feu, Hélène avait tremblé pour les jours de son amant, et n’avait plus songé qu’à s’enfuir avec lui.

Comment peindre son désespoir lorsque la petite Marietta lui parla de l’effroyable blessure que Jules avait reçue au genou et dont elle avait vu couler le sang en