Page:Stendhal - Chroniques italiennes, I, 1929, éd. Martineau.djvu/214

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tions, la femme avoua la vérité, et la paix fut faite. Les deux époux en vinrent à délibérer sur l’emploi d’une telle somme. La boulangère voulait payer quelques dettes ; mais le mari trouva plus beau d’acheter un mulet, ce qui fut fait. Ce mulet fit scandale dans le quartier, qui connaissait bien la pauvreté des deux époux. Toutes les commères de la ville, amies et ennemies, venaient successivement demander à la femme du boulanger quel était l’amant généreux qui l’avait mise à même d’acheter un mulet. Cette femme, irritée, répondait quelquefois en racontant la vérité. Un jour que César del Bene était allé voir l’enfant, et revenait rendre compte de sa visite à l’abbesse, celle-ci, quoique fort indisposée, se traîna jusqu’à la grille, et lui fit des reproches sur le peu de discrétion des agents employés par lui. De son côté, l’évêque tomba malade de peur ; il écrivit à ses frères à Milan pour leur raconter l’injuste accusation à laquelle il était en butte : il les engageait à venir à son secours. Quoique gravement indisposé, il prit la résolution de quitter Castro ; mais, avant de partir, il écrivit à l’abbesse :

« Vous saurez déjà que tout ce qui a été fait est public. Ainsi, si vous prenez intérêt à sauver non-seulement ma réputation, mais peut-être ma vie, et pour éviter un