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Page:Stendhal - Chroniques italiennes, I, 1929, éd. Martineau.djvu/324

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le visage, acheta deux ânes, et se mit à courir les rues de Rome, et à vendre du charbon en boitant. Il prit admirablement un certain air grossier et hébété, et allait criant partout son charbon avec la bouche pleine de pain et d’oignons, tandis que des centaines de sbires le cherchaient non-seulement dans Rome, mais encore sur toutes les routes. Enfin, quand sa figure fut bien connue de la plupart des sbires, il osa sortir de Rome, chassant toujours devant lui ses deux ânes chargés de charbon. Il rencontra plusieurs troupes de sbires qui n’eurent garde de l’arrêter. Depuis, on n’a jamais reçu de lui qu’une seule lettre ; sa mère lui a envoyé de l’argent à Marseille, et on suppose qu’il fait la guerre en France, comme soldat.

La confession de l’assassin de Terni et cette fuite de monsignor Guerra, qui produisit une sensation étonnante dans Rome, ranimèrent tellement les soupçons et même les indices contre les Cenci, qu’ils furent extraits du château Saint-Ange et ramenés à la prison Savella.

Les deux frères, mis à la torture, furent bien loin d’imiter la grandeur d’âme du brigand Marzio ; ils eurent la pusillanimité de tout avouer. La signora Lucrèce Petroni était tellement accoutumée à la mollesse et aux aisances du plus grand luxe, et d’ailleurs