Page:Stendhal - Chroniques italiennes, I, 1929, éd. Martineau.djvu/81

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Jules Branciforte. C’était un de ses voisins, fort pauvre ; il habitait une chétive maison bâtie dans la montagne, à un quart de lieue de la ville, au milieu des ruines d’Albe et sur les bords du précipice de cent cinquante pieds, tapissé de verdure, qui entoure le lac. Cette maison, qui touchait aux sombres et magnifiques ombrages de la forêt de la Faggiola, a depuis été démoli, lorsqu’on a bâti le couvent de Palazzuola. Ce pauvre jeune homme n’avait pour lui que son air vif et leste, et l’insouciance non jouée avec laquelle il supportait sa mauvaise fortune. Tout ce que l’on pouvait dire de mieux en sa faveur, c’est que sa figure était expressive sans être belle. Mais il passait pour avoir bravement combattu sous les ordres du prince Colonne et parmi ses bravi, dans deux ou trois entreprises fort dangereuses. Malgré sa pauvreté, malgré l’absence de beauté, il n’en possédait pas moins, aux yeux de toutes les jeunes filles d’Albano, le cœur qu’il eût été le plus flatteur de conquérir. Bien accueilli partout, Jules Branciforte n’avait eu que des amours faciles, jusqu’au moment où Hélène revint du couvent de Castro. « Lorsque, peu après, le grand poëte Cechino se transporta de Rome au palais Campireali, pour enseigner les belles-lettres à cette jeune fille, Jules, qui