Page:Stendhal - Chroniques italiennes, II, 1929, éd. Martineau.djvu/61

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Notre histoire commence le soir du jour où la Campobasso avait reçu cette annonce fatale.

Elle était immobile dans un immense fauteuil de cuir doré. Posées auprès d’elle sur une petite table de marbre noir, deux grandes lampes d’argent au long pied, chefs-d’œuvre du célèbre Benvenuto Cellini, éclairaient ou plutôt montraient les ténèbres d’une immense salle au rez-de-chaussée de son palais ornée de tableaux noircis par le temps ; car déjà, à cette époque, le règne des grands peintres datait de loin.

Vis-à-vis de la princesse et presque à ses pieds, sur une petite chaise de bois d’ébène garnie d’ornements d’or massif, le jeune Sénecé venait d’étaler sa personne élégante. La princesse le regardait, et depuis qu’il était entré dans cette salle, loin de voler à sa rencontre et de se jeter dans ses bras, elle ne lui avait pas adressé une parole.

En 1726, déjà Paris était la cité reine des élégances de la vie et des parures. Sénecé en faisait venir régulièrement par des courriers tout ce qui pouvait relever les grâces d’un des plus jolis hommes de France. Malgré l’assurance si naturelle à un homme de ce rang, qui avait fait ses premières armes auprès des beautés de la cour du régent et sous la direction