Page:Stendhal - Chroniques italiennes, Lévy, 1855.djvu/202

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François Cenci : il a été tué sous les yeux de sa fille et de sa femme, le 15 septembre 1598. Rien d’aimable ne nous reste de ce don Juan, son caractère ne fut point adouci et amoindri par l’idée d’être, avant tout, homme de bonne compagnie, comme le don Juan de Molière. Il ne songeait aux autres hommes que pour marquer sa supériorité sur eux, s’en servir dans ses desseins ou les haïr. Le don Juan n’a jamais de plaisir par les sympathies, par les douces rêveries ou les illusions d’un ccoeuroe ; ur tendre. Il lui faut, avant tout, des plaisirs qui soient des triomphes, qui puissent être vus par les autres, qui ne puissent être niés ; il lui faut la liste déployée par l’insolent Leporello aux yeux de la triste Elvire.

Le don Juan romain s’est bien gardé de la maladresse insigne de donner la clef de son caractère, et de faire des confidences à un laquais, comme le don Juan de Molière ; il a vécu sans confident, et n’a prononcé de paroles que celles qui étaient utiles pour l’avancement de ses desseins. Nul ne vit en lui de ces moments de tendresse véritable et de gaieté charmante qui nous font pardonner au don Juan de Mozart ; en un mot, le portrait que je vais traduire est affreux.

Par choix, je n’aurais pas raconté ce caractère, je me serais contenté de l’étudier, car il est plus voisin de l’horrible que du curieux ; mais j’avouerai qu’il m’a été demandé par des compagnons de voyage auxquels je ne pouvais rien refuser. En 1823, j’eus le bonheur de voir l’Italie avec des êtres aimables et que je n’oublierai jamais,