Page:Stendhal - Correspondance, I.djvu/217

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

prennent) de toute science. Je t'en parle d'après ma propre expérience : je ne me repens pas de n'avoir pas appris le grec ; mais, sans les pédants, je le saurais. Ils m'en ont dégoûté : ces ennuyeux-là ne louent, dans le divin Homère, que le peu qui est blâmable.

Mais nous voilà dans les nues. J'ai senti souvent ce mal aux joues dont tu te plains ; mais répète-toi bien que qui veut vivre avec les hommes doit contiibuer à leur plaisir, et que celui qui ne rit pas, là où l'on rit, n'y est pas admis une seconde fois ; d'ailleurs, ordinairement, à force de feindre de s'amuser, on finit par s'amuser réel­lement.

Au fond, ta lettre est délicieuse : je connais peu de femmes qui écrivent aussi bien que toi ; veux-tu en savoir la raison, c'est que tu n'est pas affectée ; tu n'affectes que de mettre le mot qui exprime le plus exactement possible tes idées, et voilà en quoi consiste tout l'art d'écrire. Cultive précieusement ce charmant talent, il est l'âme de la vie: l'homme éloquent est le vrai roi des cœurs.

Rappelle-toi les jolis vers de Charles IX au poète Ronsard.

La Rochefoucauld est un moraliste bien triste et pas toujours vrai.

J'ai bien réfléchi depuis toi ; mon voyage