Page:Stendhal - Correspondance, I.djvu/237

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n'être qu'excessivement poli ; il me serait bien pénible d'être obligé de le rayer de ma liste. Quelle joie, au contraire de ravir cette victime au poids de la détes­table éducation qui pèse sur lui ! C'est, dans ce moment-ci, la plus belle action que nous puissions faire l'un et l'autre.

D'ailleurs, en lui expliquant mes lettres, tu les comprendras mieux : tout cela est très pédant, et par conséquent du plus mauvais ton ; mais j'aime mieux être ridicule et t'être utile. Je n'ai mis ceci qu'afin que tu te garantisses de prendre ce défaut, le pire de tous en France.

Pourquoi le pire ? Parce qu'il choque la vanilé, la passion la plus générale.

Tu ne ferais peut-être pas mal de faire un cahier et d'y copier mes lettres, en laissant de la place pour les notes.

Il faut toute la force de ces institutions pour écarter 1p méphitisme de bêtises dans lequel on vît.

Mets-toi bien dans la tête que, d'ici à vingt ans, le ton de Paris aura pénétré en province et qu'alors, ce qui aujourd'hui y est de bon ton, y sera méprisé.

Ici, on ne cherche que la vérité dite sans offenser la vanilé : l'homme du meil­leur ton est celui qui sait le plus de vérités et qui offense le moins la vanité ; voilà le modèle. Pour offenser le moins la vanilé,