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Page:Stendhal - Correspondance, I.djvu/331

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je suis devenu un peu moins passionné et un peu plus raisonnable. Dieu m'a fait la grâce de voir que j'étais destiné à mourir de faim, non point à cause de la récolte de cette année et de la guerre, mais à cause de l'amour croissant de mon père pour l'agriculture. J'ai eu la force, dans cette année, de refuser un mariage qui me mettait à jamais à l'abri des ca­prices de mon père ; mais les gens sévères l'auraient trouvé peu délicat1. Je me jette donc à corps perdu dans la banque ; je m'abandonne à cinq ou six ans d'ennui et d'inutilité pour mes études, pour avoir de quoi vivre : je vais en ce moment lire des livres de banque à la Bibliothèque nationale.

Actuellement, je pense que mon père me refusera des fonds ; il ne me manque plus que cela : j'en aurai plus de mérite à devenir millionnaire. Il sera beau voir mon père se montrer plus chiche que Dupré ; mais gaudeamus bene naît, c'est les mœurs du pays ; ici, ce ne serait point ça : les Parisiens ont moins de sensibilité de mots et plus d'action. Moi, homme grossier, je donne la préférence à la se­conde.

Donne-moi de grands détails sur le

1. Peut-être s'agit-U d'un mariage avec Adèle de Nardon ; Beyle était sans doute l'amant de la mère.