Page:Stendhal - De l’amour, I, 1927, éd. Martineau.djvu/151

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sur les profondeurs du cœur humain. Je lui ai répondu au bout d’un silence : — « Mais, quand on aime, a-t-on le courage de se porter aux dernières violences ? »

Il y aurait bien moins de vague dans ce chapitre si une femme l’eût écrit. Tout ce qui tient à la fierté de l’orgueil féminin, à l’habitude de la pudeur et de ses excès, à certaines délicatesses, la plupart dépendant uniquement d’associations de sensations[1], qui ne peuvent pas exister chez les hommes, et souvent délicatesses non fondées dans la nature ; toutes ces choses, dis-je, ne pourraient se trouver ici qu’autant qu’on se serait permis d’écrire sur ouï-dire.

Une femme me disait, dans un moment de franchise philosophique, quelque chose qui revient à ceci :

« Si je sacrifiais jamais ma liberté, l’homme que j’arriverais à préférer apprécierait davantage mes sentiments, en voyant combien j’ai toujours été avare même des préférences des plus légères. » C’est en faveur de cet amant qu’elle ne rencontrera peut-être jamais, que telle

  1. La pudeur est une des sources du goût pour la parure ; par tel ajustement une femme se promet plus ou moins. C’est ce qui fait que la parure est déplacée dans la vieillesse.
    Une femme de province, si elle prétend à Paris suivre la mode, se promet d’une manière gauche et qui fait rire. Une provinciale arrivant à Paris doit commencer par se mettre comme si elle avait trente ans.