Page:Stendhal - De l’amour, I, 1927, éd. Martineau.djvu/211

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sion, prise peu à peu et dans la première jeunesse, une femme d’esprit n’aime pas longtemps un homme commun[1]. Dans le cas de la jalousie après l’intimité, il faut encore de l’indifférence apparente et de l’inconstance réelle, car beaucoup de femmes offensées par un amant qu’elles aiment encore s’attachent à l’homme pour lequel il montre de la jalousie, et le jeu devient une réalité[2].

Je suis entré dans quelques détails, parce que dans ces moments de jalousie on perd la tête le plus souvent ; des conseils écrits depuis longtemps font bien, et, l’essentiel étant de feindre du calme, il est à propos de prendre le ton dans un écrit philosophique.

Comme l’on n’a de pouvoir sur vous qu’en vous ôtant ou vous faisant espérer des choses dont la seule passion fait tout le prix, si vous parvenez à vous faire croire indifférent, tout à coup vos adversaires n’ont plus d’armes.

Si l’on n’a aucune action à faire, et que l’on puisse s’amuser à chercher du soulagement, on trouvera quelque plaisir à lire Othello ; il fera douter des apparences les

  1. La princesse de Tarente, nouvelle de Scarron.
  2. Comme dans le Curieux impertinent, nouvelle de Cervantès.