Page:Stendhal - De l’amour, I, 1927, éd. Martineau.djvu/225

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

CHAPITRE XXXVIII

De la pique[1] d’amour-propre.


La pique est un mouvement de la vanité ; je ne veux pas que mon antagoniste l’emporte sur moi, et je prends cet antagoniste lui-même pour juge de mon mérite. Je veux faire effet sur son cœur. C’est pour cela qu’on va beaucoup au delà de ce qui est raisonnable.

Quelquefois pour justifier sa propre extravagance, l’on en vient au point de se dire que ce compétiteur a la prétention de nous faire sa dupe.

La pique étant une maladie de l’honneur, est beaucoup plus fréquente dans les monarchies, et ne doit se montrer que bien plus rarement dans les pays où règne l’habitude d’apprécier les actions par leur degré d’utilité, aux États-Unis d’Amérique, par exemple.

Tout homme, et un Français plus qu’un autre, abhorre d’être pris pour dupe ;

  1. Je sais que ce mot n’est pas trop français en ce sens, mais je ne trouve pas à le remplacer.
    En italien puntiglio, en anglais pique.