Page:Stendhal - De l’amour, I, 1927, éd. Martineau.djvu/237

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Quant à l’être supérieur il se fait illusion, et l’amour qu’il sent, non seulement ne court aucun risque, mais presque toutes les faiblesses, dans ce que nous aimons, nous le rendent plus cher.

Immédiatement après l’amour-passion et payé de retour, entre gens de la même portée, il faut placer, pour la durée, l’amour à querelles, où le querellant n’aime pas. On en trouvera des exemples dans les anecdotes relatives à la duchesse de Berry (Mémoires de Duclos).

Participant à la nature des habitudes froides fondées sur le côté prosaïque et égoïste de la vie et compagnes inséparables de l’homme jusqu’au tombeau, cet amour peut durer plus longtemps que l’amour-passion lui-même. Mais ce n’est plus l’amour, c’est une habitude occasionnée par l’amour, et qui n’a de cette passion que les souvenirs et le plaisir physique. Cette habitude suppose nécessairement des âmes moins nobles. Chaque jour il se forme un petit drame. « Me grondera-t-il ? » qui occuper l’imagination comme dans l’amour-passion ; chaque jour on avait besoin de quelque nouvelle preuve de tendresse. Voir les anecdotes sur madame d’Houdetot et Saint-Lambert[1].

  1. Mémoires de madame d’Épinay, je crois, ou de Marmontel.