Page:Stendhal - De l’amour, I, 1927, éd. Martineau.djvu/242

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sans son congé, il la traitait comme une servante, et les pleurs duraient souvent plusieurs jours.

« Cette princesse si superbe, et qui se plaisait tant à montrer et à exercer le plus démesuré orgueil, s’avilit à faire des repas obscurs avec lui et avec des gens sans aveu ; elle avec qui nul ne pouvait manger s’il n’était prince du sang. Le jésuite Riglet, qu’elle avait connu enfant, et qui l’avait cultivée, était admis dans ces repas particuliers, sans qu’il en eût honte, ni que la duchesse en fût embarrassée : madame de Mouchy était la confidente de toutes ces étranges particularités ; elle et Riom mandaient les convives et choisissaient les jours. Cette dame raccommodait les amants, et cette vie était toute publique au Luxembourg, où tout s’adressait à Riom, qui de son côté avait soin de bien vivre avec tous, et avec un air de respect qu’il refusait, en public, à sa seule princesse. Devant tous, il lui faisait des réponses brusques qui faisaient baisser les yeux aux présents, et rougir la duchesse, qui ne contraignait point ses manières passionnées pour lui. »

Riom était pour la duchesse un remède souverain à l’ennui.

Une femme célèbre dit tout à coup au général Bonaparte, alors jeune héros cou-