Page:Stendhal - La Chartreuse de Parme, I, 1927, éd. Martineau.djvu/119

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voir qu’il était presque nuit. Les soldats couraient de côté et d’autre dans une confusion qui surprit fort notre héros ; il trouva qu’ils avaient l’air penaud.

— Qu’est-ce donc ? dit-il à la cantinière.

— Rien du tout. C’est que nous sommes flambés, mon petit ; c’est la cavalerie des Prussiens qui nous sabre, rien que ça. Le bêta de général a d’abord cru que c’était la nôtre. Allons, vivement, aide-moi à réparer le trait de Cocotte qui s’est cassé.

Quelques coups de fusil partirent à dix pas de distance : notre héros, frais et dispos, se dit : Mais réellement, pendant toute la journée, je ne me suis pas battu, j’ai seulement escorté un général. — Il faut que je me batte, dit-il à la cantinière.

— Sois tranquille, tu te battras, et plus que tu ne voudras ! Nous sommes perdus.

Aubry, mon garçon, cria-t-elle à un caporal qui passait, regarde toujours de temps en temps où en est la petite voiture.

— Vous allez vous battre ? dit Fabrice à Aubry.

— Non, je vais mettre mes escarpins pour aller à la danse !

— Je vous suis.

— Je te recommande le petit hussard, cria la cantinière, le jeune bourgeois a du cœur. Le caporal Aubry marchait sans