Page:Stendhal - La Chartreuse de Parme, I, 1927, éd. Martineau.djvu/149

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

nel exaspéré interrompit la remontrance qu’il leur adressait, et, de sa main droite blessée, saisit la rêne de ce cheval du côté hors du montoir.

— Arrête ! mauvais soldat, dit-il au hussard ; je te connais, tu es de la compagnie du capitaine Henriet.

— Eh bien ! que le capitaine lui-même me donne l’ordre ! Le capitaine Henriet a été tué hier, ajouta-t-il en ricanant, et va te faire f…

En disant ces paroles il veut forcer le passage et pousse le vieux colonel qui tombe assis sur le pavé du pont. Fabrice, qui était à deux pas plus loin sur le pont, mais faisant face du côté de l’auberge, pousse son cheval, et tandis que le poitrail du cheval de l’assaillant jette par terre le colonel qui ne lâche point la rêne hors du montoir, Fabrice, indigné, porte au hussard un coup de pointe à fond. Par bonheur le cheval du hussard, se sentant tiré vers la terre par la bride que tenait le colonel, fit un mouvement de côté, de façon que la longue lame du sabre de grosse cavalerie de Fabrice glissa le long du gilet du hussard et passa tout entière sous ses yeux. Furieux, le hussard se retourne et lance un coup de toutes ses forces, qui coupe la manche de Fabrice et entre profondément dans son bras : notre héros tombe.