Page:Stendhal - La Chartreuse de Parme, I, 1927, éd. Martineau.djvu/154

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rivière, qui, après avoir passé sous le pont, coulait vers la droite de la route. Il se rappelait les conseils de la bonne cantinière. Quelle amitié ! se disait-il, quel caractère ouvert !

Après une heure de marche, il se trouva très-faible. Ah çà ! vais-je m’évanouir ? se dit-il ; si je m’évanouis, on me vole mon cheval, et peut-être mes habits, et avec les habits le trésor. Il n’avait plus la force de conduire son cheval, et il cherchait à se tenir en équilibre lorsqu’un paysan, qui bêchait dans un champ à côté de la grande route, vit sa pâleur et vint lui offrir un verre de bière et du pain.

— À vous voir si pâle, j’ai pensé que vous étiez un des blessés de la grande bataille ! lui dit le paysan. Jamais secours ne vint plus à propos. Au moment où Fabrice mâchait le morceau de pain noir, les yeux commençaient à lui faire mal quand il regardait devant lui. Quand il fut un peu remis, il remercia. Et où suis-je ? demanda-t-il. Le paysan lui apprit qu’à trois quarts de lieue plus loin se trouvait le bourg de Zonders, où il serait très-bien soigné. Fabrice arriva dans ce bourg, ne sachant pas trop ce qu’il faisait, et ne songeant à chaque pas qu’à ne pas tomber de cheval. Il vit une grande porte ouverte, il entra : c’était l’auberge de l’Étrille.