Page:Stendhal - La Chartreuse de Parme, I, 1927, éd. Martineau.djvu/168

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à bas de la voiture et se sauver à travers champs.

La comtesse sourit à tout hasard, je crois, puis dit au maréchal-des-logis :

— Mais, mon cher maréchal, est-ce donc cet enfant de seize ans que vous prenez pour le général Conti ?

— N’êtes-vous pas la fille du général, dit le maréchal-des-logis ?

— Voyez mon père, dit la comtesse en montrant Fabrice. Les gendarmes furent saisis d’un rire fou.

— Montrez vos passe-ports sans raisonner, reprit le maréchal-des-logis piqué de la gaieté générale.

— Ces dames n’en prennent jamais pour aller à Milan, dit le cocher d’un air froid et philosophique ; elles viennent de leur château de Grianta. Celle-ci est madame la comtesse Pietranera, celle-là, madame la marquise del Dongo.

Le maréchal-des-logis, tout déconcerté, passa à la tête des chevaux, et là tint conseil avec ses hommes. La conférence durait bien depuis cinq minutes, lorsque la comtesse Pietranera pria ces messieurs de permettre que la voiture fût avancée de quelques pas et placée à l’ombre ; la chaleur était accablante, quoiqu’il ne fût que onze heures du matin. Fabrice, qui regardait fort attentivement de tous les côtés,