Page:Stendhal - La Chartreuse de Parme, I, 1927, éd. Martineau.djvu/445

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

de tuer un ennemi de l’homme qui payait. Arrivés à l’auberge, Ludovic les pria de regarder de tous leurs yeux, et de voir si l’un de ces deux jeunes gens qui se battaient, agissait en traître et prenait sur l’autre des avantages illicites.

Le combat un instant interrompu par les cris de mort des paysans tardait à recommencer ; Fabrice insulta de nouveau la fatuité du comte. — Monsieur le comte, lui criait-il, quand on est insolent, il faut être brave. Je sens que la condition est dure pour vous, vous aimez mieux payer des gens qui sont braves. Le comte, de nouveau piqué, se mit à lui crier qu’il avait longtemps fréquenté la salle d’armes du fameux Battistin à Naples, et qu’il allait châtier son insolence ; la colère du comte M*** ayant enfin reparu, il se battit avec assez de fermeté, ce qui n’empêcha point Fabrice de lui donner un fort beau coup d’épée dans la poitrine, qui le retint au lit plusieurs mois. Ludovic, en donnant les premiers soins au blessé, lui dit à l’oreille : Si vous dénoncez ce duel à la police, je vous ferai poignarder dans votre lit.

Fabrice se sauva dans Florence ; comme il s’était tenu caché à Bologne, ce fut à Florence seulement qu’il reçut toutes les lettres de reproches de la duchesse ;