Page:Stendhal - La Chartreuse de Parme, II, 1927, éd. Martineau.djvu/13

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ment accoutumée à ses bontés que j’ai oser espérer qu’elle voudrait bien m’accorder encore cette grâce.

La duchesse parlait assez lentement, afin de se donner le temps de jouir de la figure du prince ; elle était délicieuse à cause de l’étonnement profond et du reste de grands airs que la position de la tête et des bras accusait encore. Le prince était resté comme frappé de la foudre ; de sa petite voix aigre et troublée il s’écriait de temps à autre en articulant à peine : Comment ! comment ! La duchesse, comme par respect, après avoir fini son compliment, lui laissa tout le temps de répondre ; puis elle ajouta :

— J’ose espérer que Votre Altesse Sérénissime daigne me pardonner l’incongruité de mon costume ; mais, en parlant ainsi, ses yeux moqueurs brillaient d’un si vif éclat que le prince ne put le supporter ; il regarda au plafond, ce qui chez lui était le dernier signe du plus extrême embarras.

Comment ! comment ! dit-il encore ; puis il eut le bonheur de trouver une phrase : — Madame la duchesse, asseyez-vous donc ; il avança lui-même un fauteuil et avec assez de grâce. La duchesse ne fut point insensible à cette politesse, elle modéra la pétulance de son regard.