Page:Stendhal - La Chartreuse de Parme, II, 1927, éd. Martineau.djvu/134

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je vois arriver la grosse figure de quelque femme de chambre bien commune, chargée par procuration de soigner les oiseaux ! Mais si je vois Clélia, daignera-t-elle m’apercevoir ? Ma foi, il faut faire des indiscrétions pour être remarqué ! ma situation doit avoir quelques privilèges ; d’ailleurs nous sommes tous deux seuls ici et si loin du monde ! Je suis un prisonnier, apparemment ; ce que le général Conti et les autres misérables de cette espèce appellent un de leurs subordonnés… Mais elle a tant d’esprit, ou pour mieux dire tant d’âme, comme le suppose le comte, que peut-être, à ce qu’il dit, méprise-t-elle le métier de son père ; de là viendrait sa mélancolie ! Noble cause de tristesse ! Mais après tout, je ne suis point précisément un étranger pour elle. Avec quelle grâce pleine de modestie elle m’a salué hier soir ! Je me souviens fort bien que lors de notre rencontre près de Côme je lui dis : Un jour je viendrai voir vos beaux tableaux de Parme, vous souviendrez-vous de ce nom Fabrice del Dongo ? L’aura-t-elle oublié ? elle était si jeune alors !

Mais à propos, se dit Fabrice étonné en interrompant tout à coup le cours de ses pensées, j’oublie d’être en colère : Serais-je un de ces grands courages comme l’anti-