Page:Stendhal - La Chartreuse de Parme, II, 1927, éd. Martineau.djvu/179

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

baron Riva, il ne craignait que le poison ; la tentative de Barbone l’avait profondément alarmé, et à un tel point qu’il s’était déterminé à hasarder une démarche folle en apparence. Un matin il passa à la porte de la citadelle, et fit appeler le général Fabio Conti qui descendit jusque sur le bastion au-dessus de la porte ; là, se promenant amicalement avec lui, il n’hésita pas à lui dire, après une petite préface aigre-douce et convenable :

— Si Fabrice périt d’une façon suspecte, cette mort pourra m’être attribuée, je passerai pour un jaloux, ce serait pour moi un ridicule abominable et que je suis résolu de ne pas accepter. Donc, et pour m’en laver, s’il périt de maladie, je vous tuerai de ma main ; comptez là-dessus. Le général Fabio Conti fit une réponse magnifique et parla de sa bravoure, mais, le regard du comte resta présent à sa pensée.

Peu de jours après, et comme s’il se fût concerté avec le comte, le fiscal Rassi se permit une imprudence bien singulière chez un tel homme. Le mépris public attaché à son nom qui servait de proverbe à la canaille, le rendait malade depuis qu’il avait l’espoir fondé de pouvoir y échapper. Il adressa au général Fabio Conti une copie officielle de la sentence