Page:Stendhal - La Chartreuse de Parme, II, 1927, éd. Martineau.djvu/222

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grand sérieux, et le prince, l’œil enflammé de haine, s’écria qu’il ne serait pas le maître chez lui tant que Fabrice del Dongo serait en vie.

— Je ne puis, ajouta-t-il, ni chasser la duchesse ni souffrir sa présence ; ses regards me bravent et m’empêchent de vivre.

Après avoir laissé le prince s’expliquer bien au long, lui, Rassi, jouant l’extrême embarras, s’écria enfin :

— Votre Altesse sera obéie, sans doute, mais la chose est d’une horrible difficulté ; il n’y a pas d’apparence de condamner un del Dongo à mort pour le meurtre d’un Giletti ; c’est déjà un tour de force étonnant que d’avoir tiré de cela douze années de citadelle. De plus, je soupçonne la duchesse d’avoir découvert trois des paysans qui travaillaient à la fouille de Sanguigna, et qui se trouvaient hors du fossé au moment où ce brigand de Giletti attaqua del Dongo.

— Et où sont ces témoins ? dit le prince irrité.

— Cachés en Piémont, je suppose. Il faudrait une conspiration contre la vie de Votre Altesse…

— Ce moyen a ses dangers, dit le prince, cela fait songer à la chose.

— Mais pourtant, dit Rassi avec une