Page:Stendhal - La Chartreuse de Parme, II, 1927, éd. Martineau.djvu/275

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

tous contrebandiers finis et qui adorent madame.

— Enfin, reprit la duchesse d’un air singulièrement dégagé, si je donne du vin à mes braves gens de Sacca, je veux inonder les habitants de Parme le même soir où mon château sera illuminé, prends le meilleur cheval de mon écurie, cours à mon palais, à Parme, et ouvre le réservoir.

— Ah ! l’excellente idée qu’a madame s’écria Ludovic, riant comme un fou, du vin aux braves gens de Sacca, de l’eau aux bourgeois de Parme qui étaient si sûrs, les misérables, que monsignore Fabrice allait être empoisonné comme le pauvre L…

La joie de Ludovic n’en finissait point ; la duchesse regardait avec complaisance ses rires fous ; il répétait sans cesse : Du vin aux gens de Sacca et de l’eau à ceux de Parme ! Madame sait sans doute mieux que moi que lorsqu’on vida imprudemment le réservoir, il y a une vingtaine d’années, il y eut jusqu’à un pied d’eau dans plusieurs des rues de Parme.

— Et de l’eau aux gens de Parme, répliqua la duchesse en riant. La promenade devant la citadelle eût été remplie de monde si l’on eût coupé le cou à Fabrice. Tout le monde l’appelle le grand coupable… Mais, surtout, fais cela avec adresse, que jamais personne vivante ne