Page:Stendhal - La Chartreuse de Parme, II, 1927, éd. Martineau.djvu/354

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insiste, vous annoncerez que vous allez passer quinze jours à votre château de Sacca.

Vous allez faire appeler Fabrice et le consulter sur cette démarche qui peut le conduire en prison. Pour tout prévoir, si, pendant qu’il est sous les verrous, Rassi, trop impatient, me fait empoisonner, Fabrice peut courir des dangers. Mais la chose est peu probable ; vous savez que j’ai fait venir un cuisinier français, qui est le plus gai des hommes, et qui fait des calembours ; or, le calembour est incompatible avec l’assassinat. J’ai déjà dit à notre ami Fabrice que j’ai retrouvé tous les témoins de son action belle et courageuse ; ce fut évidemment ce Giletti qui voulut l’assassiner. Je ne vous ai pas parlé de ces témoins, parce que je voulais vous faire une surprise, mais ce plan a manqué ; le prince n’a pas voulu signer. J’ai dit à notre Fabrice que, certainement, je lui procurerai une grande place ecclésiastique ; mais j’aurai bien de la peine si ses ennemis peuvent objecter en cour de Rome une accusation d’assassinat.

Sentez-vous, Madame, que, s’il n’est pas jugé de la façon la plus solennelle, toute sa vie le nom de Giletti sera désagréable pour lui ? Il y aurait une grande pusillanimité à ne pas se faire juger, quand on est sûr d’être innocent. D’ailleurs,