Page:Stendhal - La Chartreuse de Parme, II, 1927, éd. Martineau.djvu/442

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pas qu’elle n’allât point voir un prédicateur aussi étonnant. Enfin, disait-on, il l’emporte même sur le meilleur ténor de l’Italie ! Si je le vois, je suis perdue ! se disait la marquise.

Ce fut en vain que Fabrice, dont le talent semblait plus brillant chaque jour, prêcha encore plusieurs fois dans cette même petite église, voisine du palais Crescenzi, jamais il n’aperçut Clélia, qui même à la fin prit de l’humeur de cette affectation à venir troubler sa rue solitaire, après l’avoir déjà chassée de son jardin.

En parcourant les figures de femmes qui l’écoutaient, Fabrice remarquait depuis assez longtemps une petite figure brune fort jolie, et dont les yeux jetaient des flammes. Ces yeux magnifiques étaient ordinairement baignés de larmes dès la huitième ou dixième phrase du sermon. Quand Fabrice était obligé de dire des choses longues et ennuyeuses pour lui-même, il reposait assez volontiers ses regards sur cette tête dont la jeunesse lui plaisait. Il apprit que cette jeune personne s’appelait Anetta Marini, fille unique et héritière du plus riche marchand drapier de Parme, mort quelques mois auparavant.

Bientôt le nom de cette Anetta Marini,