Page:Stendhal - La Chartreuse de Parme, II, 1927, éd. Martineau.djvu/463

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Il serait bien long de décrire tous les genres de folies auxquels furent en proie, ce jour-là, les cœurs de Fabrice et de Clélia. La petite porte indiquée dans le billet n’était autre que celle de l’orangerie du palais Crescenzi, et, dix fois dans la journée, Fabrice trouva le moyen de la voir. Il prit des armes, et seul, un peu avant minuit, d’un pas rapide, il passait près de cette porte, lorsqu’à son inexprimable joie, il entendit une voix bien connue, dire d’un ton très-bas :

— Entre ici, ami de mon cœur.

Fabrice entra avec précaution et se trouva à la vérité dans l’orangerie, mais vis-à-vis une fenêtre fortement grillée et élevée, au-dessus du sol, de trois ou quatre pieds. L’obscurité était profonde, Fabrice avait entendu quelque bruit dans cette fenêtre, et il en reconnaissait la grille avec la main, lorsqu’il sentit une main, passée à travers les barreaux, prendre la sienne et la porter à des lèvres qui lui donnèrent un baiser.

— C’est moi, lui dit une voix chérie, qui suis venue ici pour te dire que je t’aime, et pour te demander si tu veux m’obéir.

On peut juger de la réponse, de la joie, de l’étonnement de Fabrice ; après les premiers transports, Clélia lui dit :