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beaucoup ; écris l’ordre, La Rose, toi qui as une main droite.

Sans rien dire, La Rose tira de sa poche un petit livret de parchemin, écrivit quelques lignes, et, déchirant une feuille, la remit à Fabrice ; le colonel répéta l’ordre à celui-ci, ajoutant qu’après deux heures de faction il serait relevé, comme de juste, par un des trois cavaliers blessés qui étaient avec lui. Cela dit, il entra dans l’auberge avec ses hommes. Fabrice les regardait marcher et restait immobile au bout de son pont de bois, tant il avait été frappé par la douleur morne et silencieuse de ces trois personnages. On dirait des génies enchantés, se dit-il. Enfin il ouvrit le papier plié et lut l’ordre ainsi conçu :

« Le colonel Le Baron, du 6e dragons, commandant la seconde brigade de la première division de cavalerie du 14e corps, ordonne à tous cavaliers, dragons, chasseurs et hussards de ne point passer le pont, et de le rejoindre à l’auberge du Cheval-Blanc, près le pont, où est son quartier-général.

« Au quartier-général, près le pont de la Sainte, le 19 juin 1815.

« Pour le colonel Le Baron, blessé au bras droit, et par son ordre, le maréchal-des-logis,

« La Rose. »