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chez le maréchal-des-logis, à l’annonce de l’ordre enlevé ; il comprit que c’était une insulte personnelle qu’on lui avait faite, et se promit bien de ne plus se laisser jouer.

Armé du pistolet d’arçon du maréchal-des-logis, Fabrice avait repris fièrement sa faction, lorsqu’il vit arriver à lui sept hussards montés : il s’était placé de façon à barrer le pont ; il leur communique l’ordre du colonel, ils en ont l’air fort contrariés, le plus hardi cherche à passer. Fabrice, suivant le sage précepte de son amie la vivandière, qui, la veille au matin, lui disait qu’il fallait piquer et non sabrer, abaisse la pointe de son grand sabre droit et fait mine d’en porter un coup à celui qui veut forcer la consigne.

— Ah ! il veut nous tuer, le blanc-bec ! s’écrient les hussards, comme si nous n’avions pas été assez tués hier ! Tous tirent leurs sabres à la fois et tombent sur Fabrice ; il se crut mort ; mais il songea à la surprise du maréchal-des-logis, et ne voulut pas être méprisé de nouveau. Tout en reculant sur son pont, il tâchait de donner des coups de pointe. Il avait une si drôle de mine en maniant ce grand sabre droit de grosse cavalerie, beaucoup trop lourd pour lui, que les hussards virent bientôt à qui ils avaient affaire ; ils cherchèrent alors, non pas à le blesser, mais à lui couper son habit sur le corps. Fabrice reçut ainsi trois ou quatre petits