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lui fallait un héros qui traversât des milieux différents et touchât aux plus hautes comme aux plus basses conditions de la hiérarchie sociale. Il a inventé un Fabrice, comme Lesage a imaginé un Gil Blas. Fabrice, qui a l’air d’être le principal personnage de la Chartreuse de Parme, n’est à vrai dire qu’un passe-partout, un porte-paroles, un homme de paille, d’un caractère moyen et neutre, sans grandes vertus ni vices bien tranchés, qui soulève autour de lui, à mesure qu’il avance dans la vie, toute une poussière de faits, de ces faits que Stendhal avait coutume d’appeler des faits probants, parce qu’ils révèlent un caractère, une situation, un état social. Il ne faut donc point chercher dans la Chartreuse de Parme un roman bien composé, où Fabrice, figure prédominante, ramène autour de lui tous les éléments d’une seule et même action. Laissez-vous aller au récit des événements qui portent Fabrice, et vous aurez le plaisir de connaître l’Italie, telle que l’a vue ou se l’est figurée Stendhal, qui l’a connue, aimée et pratiquée durant la meilleure part de sa vie.

Aussi ne puis-je me ranger à l’avis de M. Émile Zola, qui trouve trop longue et inutile toute la première partie de la Chartreuse de Parme. Elle m’avait enchanté autrefois ; le charme ne s’en est